L'enlèvement

Comme le résume Thérèse Ledoux-Triffaux (1993, p. 16), Godefroid Devreese fut « un des plus éminents sculpteurs de son temps, réalisant des œuvres d’une puissance fougueuse et d’un dynamisme inégalé, mais aussi d’une grande finesse, d’une délicatesse et d’une grâce exquises. Chez lui, tout est force et tumulte, ingénuité et douceur, sensualité et tendresse à la fois ; ses compositions ne laissent rien aux hasards de l’exécution, il a le respect de la ligne, la facture habile et le métier inné ». Cette synthèse de l’art du sculpteur s’applique parfaitement à ce groupe d’esprit néo-romantique par la mise en scène et le choix du sujet, un chevalier du Moyen Âge cuirassé, monté sur un cheval se dressant sur ses pattes postérieures, et enlevant sa belle coiffée d’un hennin. L’inspiration du groupe Saint Michel équestre terrassant le dragon du français Emmanuel Frémiet exposé à Paris en 1900 (Barentin, Jardin Saint-Georges) et connu par divers tirages en bronze de petites dimensions (1891, Paris, Musée d’Orsay, inv. RF 2003) ne semble pas exclu.

L’Enlèvement combine deux centres d’intérêt de Godefroid Devreese, le Moyen Âge d’une part, dont témoigne notamment le grandiloquant Monument de Groeninghe à Courtrai (1902-1906) commémorant la bataille des Éperons d’Or, et, d’autre part, la représentation équestre. On lui connaît plusieurs statuettes dans ce registre, dont Cheval sellé (bronze, Schaerbeek, Collection communale, inv. 712) et Amazone (idem, inv. 710). Dans ces exemples, comme dans L’Enlèvement, le sculpteur s’affirme comme un remarquable sculpteur animalier, se montrant attentif à restituer la morphologie du cheval, n’hésitant pas à représenter les veines gonflées du museau et des pattes antérieures du cheval cambré et carapaçonné.

Auteur : Association du Patrimoine artistique, A. Jacobs, 2021