Les deux bouquets

Bien que le sujet et sa posture soient empruntés à des tableaux représentant la femme bourgeoise de l’époque, le corset, le sous-vêtement ainsi que la décoration intérieure témoignent de la condition modeste de la jeune femme. Cette œuvre atteste de la maîtrise du peintre des harmonies subtiles. La palette, assourdie de bruns et de beiges animés de tâches de couleurs plus vives, s’accorde à la tonalité méditative et intime de l’œuvre. La jeune femme semble en effet en proie au doute et aux mauvais pressentiments. S’apprête-t-elle à sortir ou rentre-t-elle d’un rendez-vous galant ? Le billet et le bouquet de roses en évidence sur la commode ne nous le disent pas.

Toutefois le titre du tableau, Les deux bouquets, est révélateur. L’un des bouquets dans un vase, symbole de vertu, de fidélité et de tempérance contraste avec le bouquet de roses synonyme d’amour et de tendre passion, expression romantique de l’idéal féminin. Le profil trois quarts, l’attitude passive du modèle, les épaules dénudées à l’érotisme lascif évoquent une image de la femme véhiculée par les gravures et les illustrations en vogue à l’époque de Speekaert. Mathilde Demanet, l’épouse de l’artiste, qui sert de modèle dans ce tableau fut également peintre, aquarelliste et dessinatrice. Elle fut l’une des premières femmes à participer à des expositions organisées dans les cercles bruxellois d’avant-garde, tels Les Hydrophiles et La Chrysalide.